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Pérégrinations d'un journaliste
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1 juillet 2009

Extraction pétrolière au Nigéria : exploitation inhumaine

AMNESTY_BLOGAmnesty International France s'attaque à l'impunité des sociétés internationales qui exploitent les ressources pétrolière, gazière et minière en Afrique. Son premier rapport dénonce cinquante années de pollution et de droits humains bafoués par la société Shell dans le Delta du Niger.

"On estime à l'équivalent d'un Exxon Valdez par an depuis cinquante ans la quantité de pétrole déversée dans le delta du Niger": c'est avec cette image surréaliste du pétrolier américain échoué en 1989 sur les côtes de l'Alaska que Francis Perrin, porte-parole d'Amnesty International France (AIF) et directeur de la rédaction de la revue Pétrole et gaz arabe, a conclu le petit-déjeuner de presse organisé hier par l'aile française de l'ONG. Elle dénonce dans un rapport la pollution liée à l'extraction pétrolière au Nigeria. "Nigeria : Petroleum, pollution and poverty in the niger delta" est un document accablant élaboré après un an d'enquête et qui met en exergue cinquante ans d'activités industrielles au mépris des populations et de leur environnement. Le consortium pétrolier SPDC (Shell petroleum development program) et l'Etat nigérian sont particulièrement pointés du doigt : "Nous parlons de la violation massive des droits humains. Cela concerne plusieurs millions de personnes", souligne encore Francis Perrin.

Ainsi, outre le déversement des huiles dans la nature, "le torchage des gaz provoque des troubles visuels, respiratoires et des nausées", rapporte encore AIF.  Cette pratique a pourtant été interdite par le gouvernement fédéral en 2005 mais aucune société n'a jusqu'à maintenant respecté la loi. Concernant les huiles, il semble que l'activité plus visible depuis 2005 du Mouvement d'émancipation du delta du Niger (Mend), groupe rebelle qui a officiellement déclaré la guerre aux compagnies pétrolières et qui pratique notamment des enlèvements, camoufle un manque évident d'entretien des infrastructures. En effet, si la rébellion et la population pratiquent régulièrement le siphonnage et  des actes de sabotage sur les pipelines, la corrosion des infrastructures est elle aussi la cause des fuites importantes dans tout le delta, selon des constatations réalisées sur place par l'ONG : "Les compagnies pétrolières étaient presque plus transparentes avant les activités du Mend" précise Francis Perrin. Les activités terroristes de la rébellion servent les compagnies qui se retranchent derrière pour expliquer les fuites massives dans l'environnement.

IMPUNITE. Comment expliquer que le Nigeria, premier producteur africain avec les secondes réserves de pétrole derrière la Lybie, se soit appauvri et que les conditions de vie de ses habitants se soient détériorées, alors que les revenus pétroliers depuis cinquante ans sont estimés à 600 milliards de dollars? La corruption de l'Etat et les pratiques des compagnies pétrolières consistant à bafouer les droits des populations sont une explication. Mais la non possibilité pour les peuples de se défendre devant un tribunal exacerbe cette situation. L'une des revendications d'Amnesty est de permettre un recours dans le pays d'origine de l'entreprise responsable de tels actes. "Il s'agit de mettre un terme à la culture d'impunité des entreprises", insiste le porte parole d'AIF.

Premier opérateur au Nigeria depuis cinquante ans, Shell est la cible principale d'AIF. Le consortium SPDC est conduit à 40% par ce dernier et regroupe les plus grandes sociétés mondiales telles que Total, Chevron ou encore Eni. L'ONG a décidé hier de joindre l'acte militant à la parole en allant laver de manière symbolique une station Shell dans le 19e arrondissement de Paris. Vêtus de tenues blanches et de masques, brandissant des pancartes dénonçant les pollutions dans le Delta du Niger, une douzaine de militants ont frotté avec de l'eau le sol de la station service, devant les caméras et sous les yeux médusés des clients. "Nous donnons 100 jours au nouveau président de Shell pour inverser la tendance", prévient ainsi Amnesty. "Peu importe les coûts que cela pourrait engendrer, lorsque l'on parle de droits humains, nous sommes dans le registre de l'obligation', rappelle encore Francis Perrin.

Le Nigeria est probablement un cas d'école en matière d'impunité industrielle, ce qui explique le choix d'Amnesty pour ce premier rapport. Il est par ailleurs le prélude d'un travail qui devrait durer au moins six ans et donner naissance à plusieurs publications sur l'extraction des ressources (pétrole, gaz et minerais) en Afrique.

Photo et texte de Michael Pauron © Tous droits réservés


Quelques témoignages

A_fisherman_with_his_canoe_in_Goi_c_Kadir_van_LohuizenNOOR_web"Pour pêcher, on doit pagayer pendant près de quatre heures en traversant plusieurs cours d'eau pour arriver à un endroit où la pollution est plus faible et où on peut attraper du poisson. Mais lorsqu'on les ouvre, certains poissons dégagent une odeur de pétrole brut", raconte un pêcheur au Center for Environment, Human right and development, après un déversement considérable survenu à Bodo (Ogoniland) entre aout et novembre 2008. Dans son rapport, Amnesty cite également un membre de la communauté Bodo qui explique que son peuple "meurt de faim" car la pollution est "partout, dans l'eau, l'air". "Aujourd'hui nous mourrons de faim. Il faut [que les responsables] viennent voir ce que nous vivons." (crédit photo: Kadir van Lohuizen/NOOR)

à lire également : http://www.romandie.com/infos/news2/090630165459.ref26ufz.asp ; http://environnement.blogs.liberation.fr/noualhat/2009/05/nigeria-shell-sur-le-banc-des-accus%C3%A9s.html

sites : http://www.rse-et-ped.info/ ; www.amnesty.fr ;


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